Pour faire tourner l'industrie éolienne au Canada
2008-10-14
Les grands espaces libres du Canada sont idéals pour l’éolien, cette source d’énergie verte et propre que le ciel met gratuitement à notre disposition. Pourtant, disent les experts, si bien loti soit-il, le Canada est en retard par rapport au mouvement mondial en faveur de l’énergie éolienne.
« Je crois que le Canada a pris conscience un peu tard du potentiel qu’elle représentait », affirme Sean Whittaker, vice-président de l’élaboration des politiques au sein de l’Association canadienne de l’énergie éolienne (CanWEA), un organisme à but non lucratif.
CanWEA vise à encourager l’investissement dans 10 000 MW de capacité éolienne d’ici 2010, ce qui comblerait cinq pour cent des besoins en électricité du Canada. En comparaison, 22 pour cent de l’énergie consommée au Danemark est tirée de l’éolien, et l’Allemagne et l’Espagne obtiennent respectivement huit pour cent de leur électricité grâce à l’énergie éolienne.
Au dire de M. Whittaker, il est possible de générer 15 à 20 pour cent de l’électricité par le vent sans qu’il y ait d’effets négatifs sur le réseau électrique existant. Selon lui, le Canada a la capacité de jouer un rôle de leader dans le secteur de l’énergie éolienne, mais il lui faut d’abord une stratégie à cet égard. L’association pour laquelle il œuvre milite pour faire de l’énergie éolienne une part importante de l’ensemble des sources d’électricité au Canada, pays qu’elle dit d’ailleurs « très riche quant à son potentiel de ressources et à sa capacité d’intégration de l’énergie éolienne ».
Selon des chiffres estimatifs du Global Wind Energy Council cités par M. Whittaker, d’ici à l’année 2020, entre 800 milliards et 1 billion de dollars seront investis dans l’industrie éolienne. Les investisseurs de ce secteur veulent une politique environnementale stable et à long terme.
Mais avant, il nous faut surmonter certaines difficultés, précise Morel Oprisan, directeur adjoint des technologies des énergies renouvelables au ministère des Ressources naturelles du Canada (RNCan).
M. Oprisan explique qu’au cours des dernières années la capacité éolienne installée au Canada a grandement augmenté. En ce moment, elle est de près de 2 000 MW.
Toutefois, comme l’indique M. Oprisan, il faut compter avec la position « pas dans ma cour » adoptée par certaines collectivités, qui, pour des questions de bruit et d’obstruction, mettent un frein aux efforts de développement. Ensuite, et plus sérieux encore, est la réalité que la valeur d’une éolienne est directement liée aux conditions de vent dans l’endroit où elle est située. Et puis, la réglementation est un autre élément important; l’énergie demeurant de compétence provinciale, chaque province y va de ses propres règlements.
« D’où la grande importance, de dire M. Oprisan, du travail que nous faisons en association avec l’industrie afin de mettre en place des normes nationales pour assurer une uniformité dans l’installation des turbines éoliennes partout au pays. »
En effet, depuis les trois dernières années, RNCan collabore avec l’Association canadienne de normalisation (CSA) et le Conseil canadien des normes. De plus, le Canada est maintenant membre à part entière du comité de la Commission électrotechnique internationale (CEI CE 88) où sont créées les normes internationales sur les éoliennes. Les normes touchent à divers sujets allant des exigences en matière de conception (CEI 61400-1) aux techniques de mesure du bruit (CEI 61400-11) et de mesure du rendement énergétique (CEI 61400-12-1).
Un jour ou l’autre, il est probable que ces mêmes normes soient soumises au Conseil canadien des normes pour qu’il approuve leur adoption en tant que normes nationales.
Les normes nationales porteront sur diverses questions, telles que le rendement et la sécurité des turbines, ainsi que le raccordement aux réseaux publics de distribution d’électricité. D’après M. Oprisan, la plupart de ces normes seront publiées cette année et, à l’instar de toutes les autres normes, celles-ci seront à ce moment-là volontaires. À son avis, l’adhésion du marché est indispensable à la réussite de leur mise en œuvre, et les services publics d’électricité participent justement de façon active aux travaux des comités d’élaboration des normes.
Pour M. Whittaker aussi, la normalisation est une étape prometteuse en vue de l’exploitation du potentiel du vent.
« L’incroyable importance des normes dans la croissance de toute industrie est souvent négligée, dit-il. Et c’est quelque chose que nous prenons très au sérieux — que ce soit pour l’évaluation du vent, l’élaboration de politiques municipales standard, la fabrication des composantes ou l’intégration au réseau, les normes sont indispensables. »
D’ailleurs, elles ont déjà commencé à façonner le secteur de l’énergie éolienne. Le parc éolien Cypress de SaskPower a été le premier service public d’électricité à se voir accorder une certification selon la norme de management environnemental (ISO 14001) de l’Organisation internationale de normalisation. Il en a tiré de nombreux avantages : une plus grande assurance que les risques liés à l’environnement sont gérés; un personnel mieux formé et un meilleur déploiement des ressources humaines; une efficacité supérieure dans les opérations et une crédibilité accrue aux yeux des organismes de réglementation et des clients. De plus, Turbowinds Canada Inc., une société qui conçoit et fabrique des éoliennes et des pompes-turbines, travaille dans le respect des normes de qualité ISO 9001.
Au-delà de l’industrie, les normes peuvent aussi avoir sur les collectivités des retombées bénéfiques sur le plan économique, social et environnemental. Selon M. Whittaker, le potentiel de ces retombées est particulièrement grand pour ce qui est de revitaliser les collectivités rurales.
« En raison de sa nature même, nous voyons le vent comme une facette rurale du développement. Il faut des terrains découverts assez vastes pour exploiter l’énergie éolienne, dit-il. Et dans la plupart des cas, nous constatons qu’au bout du compte, l’établissement de parcs éoliens est un vrai coup de pouce pour les collectivités rurales. Les revenus des municipalités augmentent, et une diversification économique de cette nature est donc d’une grande importance pour les collectivités rurales, tout spécialement à un moment où bon nombre d’industries du secteur primaire sont en déclin. »
M. Whittaker a bon espoir que le vent ouvrira la voie à des collectivités mieux pensées et écologiquement viables.
« Nous avons encore du chemin à faire, dit-il, mais le potentiel éolien du Canada est l’un des meilleurs au monde. »
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Cet article est paru pour la première fois dans le volume 35 de la revue CONSENSUS, 2008. L'information qu'il contient était exacte au moment de la publication mais n'a pas été mise à jour ni révisée depuis. Elle pourrait donc ne pas tenir compte de l'évolution récente du sujet traité. Si vous avez des questions au sujet du contenu de cet article, n'hésitez pas à communiquer avec le Conseil canadien des normes.
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